Campagne 2023/2024 Pour la CGB, le marché doit permettre une rémunération à 55 €/t de betterave
La betterave connaît, pour la première fois depuis longtemps, une bonne année économique, salue la Confédération générale des planteurs de betteraves (CGB) ce 28 novembre. Pour autant, les voyants ne sont pas tous au vert pour la campagne à venir, notamment en raison de la disparition progressive des moyens de protection des plantes.
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Si les rendements betteraviers n’ont pas tenu toutes leurs promesses, « cela fait bien longtemps qu’on n’a pas connu d’année aussi rentable que 2023 », salue Franck Sander, président de la CGB, le 28 novembre. Malgré une baisse de 5 % des surfaces par rapport à l’année précédente, le rendement moyen devrait avoisiner les 83 tonnes à 16°/ ha, pour une production totale de 31,5 Mt.
Les conditions de récolte n’ont cependant pas été faciles, compte tenu de la pluie, obligeant les usines à tourner au ralenti, et certaines zones comme le Pas-de-Calais, où les champs sont toujours recouverts d’eau, risquent encore de connaître des difficultés si le temps ne s’améliore pas. La campagne a par ailleurs été marquée par de fortes attaques de cercosporiose, en revanche les dégâts de la jaunisse sont restés localisés dans la région de Chartres.
Un marché du sucre porteur
Pour la CGB, les marchés sont aujourd’hui porteurs, avec un cours du sucre qui atteint des niveaux records, dans un contexte de déficit de l’offre pour la cinquième année consécutive, mais le syndicat alerte cependant sur la forte pression du sucre en provenance d’Ukraine. Alors que le déficit en sucre de l’Union européenne s’établit entre deux et trois millions de tonnes, l’Ukraine pourrait y exporter 700 à 800 000 tonnes pour la campagne à venir. Si le soutien à l’Ukraine en guerre s’avère légitime, cette situation reste contradictoire pour les agriculteurs pour qui l’on pourrait rétablir cette année l’obligation de maintenir 4 % de leurs surfaces en jachère, dans un contexte où la souveraineté alimentaire reste mise en avant.
« On demande une gestion plus dynamique de ces importations de sucre ukrainien, soit avec un contingent, soit via l’exportation de ce sucre vers les pays tiers », explique Nicolas Rialland, directeur général de la CGB. En parallèle, le syndicat pousse la réflexion sur la mise en place d’outils de régulation dans la prochaine Pac. « Si on augmente entre 5 et 10 % les surfaces, l’UE pourrait, avec de bons rendements, redevenir excédentaire, avec un prix européen en baisse », ajoute Franck Sander, qui appelle donc à une maitrise des surfaces à l’échelle européenne.
Des coûts de production en hausse de 35 % depuis 2020
Ce marché porteur qui devrait permettre de payer la betterave autour de 55 €/t - à moduler en fonction de chaque groupe sucrier français, préciser la CGB - contre 43,7 €/t en 2022-2023. Une hausse importante « mais nécessaire car on constate 35 % de hausse de nos coûts de production depuis 2020 », précise Franck Sander, ajoutant qu’il est nécessaire que les exploitations agricoles retrouvent une capacité d’investissement. Cette rémunération s'avère d’autant plus importante qu’une partie de ces coûts ne redescendra pas, notamment les prix du matériel, du bâtiment, ou encore de la main-d’œuvre. Donc « produire à 25€/t ne sera plus possible », insiste Franck Sander, alors qu’en parallèle, le rendement moyen est passé de 88 t/ha pour la décennie 2010-2020 à 83 t/ha en 2023. Le seuil de rentabilité est aujourd’hui à 35 €/t, indique la CGB.
Retrouvez l'interview de Franck Sander, président de la CGB, sur les principaux enjeux de la filière betteravière :
Une pression inédite sur les moyens de production
La CGB dénonce également une pression inédite sur les moyens de protection des plantes, au niveau européen mais aussi français. L’interdiction définitive des néonicotinoïdes, entérinée par la Cour de justice de l’Union européenne en janvier dernier, rend plus complexe la lutte contre la jaunisse, et si le gouvernement a promis une indemnisation totale des planteurs pour 2023, « les modalités précises de la compensation financière ne sont pas connues. « Pour la jaunisse, le problème reste prégnant. Si en 2024 on connaît une attaque de pucerons aussi virulente qu’en 2020, nous ne sommes pas mieux armés », prévient Nicolas Rialland. Le PNRI a certes identifié un certain nombre de solutions potentielles (variétés tolérantes, biocontrôle, nouvelles molécules...), mais elles ne sont pas encore suffisamment abouties pour la campagne à venir.
En parallèle, la CGB s’inquiète du plan de réduction des produits phytosanitaires annoncé en février et qui identifie 75 molécules à remplacer. « Il y a un énorme décalage avec la réalité, on essaye de dialoguer avec l’administration pour trouver terrain d’entente, notamment pour que les instituts techniques soient mis au cœur du dispositif », explique le directeur général de la CGB. Sans compter que parmi les molécules identifiées pour être interdites, deux permettent aujourd’hui de lutter, en foliaire, contre la jaunisse de la betterave et continueront à être utilisées par les autres pays européens producteurs de betteraves.
« Plus on va perdre des moyens de protection, plus le prix doit être au rendez-vous, mais plus on perdra des surfaces car des agriculteurs se retrouveront dans des impasses », prévient Franck Sander.
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